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La gestion des projets complexes

Projets complexes : adopter la stratégie du projet latéral

L’ouvrage « La stratégie du projet latéral – Comment réussir le changement quand les forces politiques et sociales doutent ou s’y opposent » propose de créer un projet dit latéral, voire plusieurs, pour pouvoir mener à terme le changement. Si le projet tel qu’envisagé initialement par le demandeur « ne passe pas » auprès des acteurs concernés, il faut le redéfinir en un ou plusieurs projets dits « latéraux » qui pourront rencontrer un écho favorable parmi les acteurs concernés parce que correspondant à leurs objectifs et apportant des solutions à leurs préoccupations.

Largement inspiré de la sociodynamique, l’ouvrage s’appuie ainsi sur les travaux de Jean-Christophe Fauvet mais aussi Eric Berne (analyse transactionnelle), Edouard de Bono (la pensée latérale, les six chapeaux), René Girard et Michel Crozier.

 

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« Le chemin est long du projet à la chose » (Molière, Tartuffe)

La complexité d’un projet peut être technique ou relationnelle. Ou les deux ! Par projet complexe, Olivier d’Herbemont et Bruno César entendent un projet qui présente une complexité relationnelle : opposants nombreux, peu d’alliés, mauvaise mobilisation des alliés…

Une sélection de points à retenir

Projet et problème

Les auteurs observent une tendance fâcheuse à réduire le projet à l’exposé d’un problème ou de sa « solution » alors qu’un projet devrait être l’expression d’une vision faite pour donner envie. Nombre de projets, que ce soit en entreprise ou dans le domaine public, reflètent une approche consistant à se débarrasser d’un problème sans pour autant qu’il y ait pro-jet.

Les mots-clés de la gestion de projet

Trois mots : objectif, actions, acteurs.

Le champ des acteurs

Deux conseils à l’usage des chefs de projet : ne pas se laisser imposer des acteurs par habitude et ne pas oublier que « là où l’on regarde », souvent par habitude ne recouvre pas forcément « ce qu’il faudrait explorer » pour trouver les acteurs pertinents.

Résistance au projet

Accepter que :
– un peu d’antagonisme ne nuit pas au projet !
– les meilleurs alliés ne sont pas des bénis oui-oui mais des acteurs capables de critiquer et de prendre des initiatives pour le projet !

Les dérapages comportementaux

Tout participant à un projet a déjà pu observer les dérapages comportementaux qui jalonnent la route d’un projet. Ces dérapages réduisent le champ intellectuel (mauvaise analyse, réflexion, prise de décision) et augmentent la violence. Face à ces dérapages comportementaux, le chef de projet devra veiller à comprendre ce qui se passe et assurer une présence rassurante, « aidante ».

Activité et projet

Quand on manage une activité, un service on peut parfois se dire « Je ne vais plus rien faire et vais voir si ma boutique continue à tourner » et cette approche est parfois très pertinente. Quand on pilote un projet, n’y pensez pas, ça ne marche pas ! Si le chef de projet ne fait rien, le projet ne tourne pas. D’ailleurs on ne lui demande pas de « tourner » mais d’avancer.

Réussite du projet

Les auteurs affirment que la réussite d’un projet est la somme des énergies des acteurs qui ont su s’organiser pour agir ensemble. Pour le chef de projet, il s’agit donc d’identifier les alliés du projet, les structurer et les faire agir ensemble, de concert.

 

projets complexes

 

Attention au clonage faussement rassurant !

Les auteurs de La stratégie du projet latéral l’expriment fort bien :

L’expérience des projets complexes nous amène à constater que moins nous connaissons les sujets au départ, meilleur sera notre travail. A l’inverse, si nous connaissons bien un domaine, nous nous retrouvons dans l’obligation de défendre une position et de croire que c’est la bonne.

Incertitude et gestion de projet

Pour gérer l’incertitude, une grille pratique : classer les événements qui relèvent de la responsabilité du chef de projet, événements prévisionnels et non prévisionnels et ceux qui ne sont pas directement issus du projet, qu’ils soient prévisionnels ou pas.

Petits changements ou grand changement ?

Entre plusieurs petits changements échelonnés dans le temps et un gros changement à un instant donné, il faut privilégier le second choix. Cinq raisons à ce choix : économie, visibilité par les acteurs, sacralisation, fonctionnement systémique et effet de cliquet.

Le projet latéral

Plus qu’une démarche, le projet latéral est un état d’esprit à garder tout au long du projet, en respectant 5 principes :
– Tenir compte de l’irrationnel (en utilisant la grille VUE – Valeurs Utilités Envies)
– Ne pas respecter impérativement le temps mais respecter la synchronisation
– Oser la rupture
– Faire écrire le projet latéral par ses alliés
– Passer de la sanction au bénéfice mérité.

Les auteurs proposent d’utiliser la démarche de médiation-révélation en 5 étapes, basée sur la stratégie des alliés, pour élaborer les projets latéraux nécessaires :
1) Identifier sur un terrain donné les hésitants et triangles d’or.
2) Faire la tournée des popotes
3) Construire un projet latéral adapté aux personnes rencontrées
4) Inviter les alliés rencontrés à se réunir pour écouter la synthèse des entretiens réalisée par le médiateur. Révéler le projet latéral.
5) Accompagner l’équipe en l’aidant à réaliser son projet latéral.

Recommencer sur un nouveau domaine…jusqu’à couvrir l’ensemble des domaines du projet.

La relation aidante doit permettre de développer la dynamique du projet latéral :
– Aider les alliés à agir
– Aider à se mettre d’accord (scénarios)
– Aider à structurer son action dans le temps
– Aider à matérialiser la situation future (chrono-budget et chrono-planning).

Les éléments cités ici ne s’appliquent pas seulement aux projets complexes mais s’avèrent utiles à tout projet de changement…même ceux ne nécessitant pas de créer un projet latéral.

 

 

 

 

 

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Comprendre le changement

Les changements de la langue écrite : le langage digital

Le langage digital, un nouveau langage ?

« Le langage, l’entreprise et le digital », titre du dernier ouvrage de Jeanne Bordeau, fondatrice de l’Institut de la qualité de l’expression nous invite à réfléchir sur les changements de la langue de l’entreprise induits par le digital. langage digital

Un changement de paradigme

A ceux – il en reste – qui croient qu’Internet n’est qu’un changement de technologie, Jeanne Bordeau montre que l’arrivée du digital est un changement de paradigme. L’entreprise ou les marques ne peuvent plus communiquer comme avant l’avènement du numérique. Le fact-checking (vérification par les faits rendue plus facile et rapide par l’usage d’internet) impose une cohérence de langage difficile à atteindre pour les marques. Finie la langue déclarative des années 90. Le consomm’acteur veut des arguments, des preuves, des exemples. Le consomm’acteur a le pouvoir de dialoguer avec la marque, sans oublier que 82% des consommateurs prennent en compte ou au moins lisent les avis des internautes.

langage digital
Jeanne Bordeau

L’image avant le mot ? L’émotion avant tout ?

La communication digitale semble inévitablement relever de story telling, émotion, rêve, projection, mode ludique, humour…L’image y a une place prédominante même si parfois on ne sait plus trop si l’on veut désigner par là « image » (imago) ou métaphore…

Jeanne Bordeau alerte : « Amoureuse du français et militante de la qualité d’expression, je m’inquiète face à une logorrhée 3.0 insipide et désincarnée. On n’automatise pas l’échange entre les hommes. »

Les dangers de l’écriture digitale

. La dictature de l’urgence, au détriment de la fiabilité. Dans le monde du digital tout est publié sans « bon à tirer ». On peut cependant objecter à l’auteur le rôle des modérateurs.

. L’infobésité. Il est amusant de constater qu’au fil des pages du livre, le nombre de tweets à la minute augmente. 277 000 sur une page, 350 000 sur une autre. Plaisanterie mise à part, chacun ou presque subit au quotidien l’infobésité, tout en étant parfois victime du FOMO (Fear Of Missing Out).

. Le manichéisme. « Où maniera t-on la qualité, le subtil, la nuance ? » s’inquiète Jeanne Bordeau.

Ne pas perdre le nord

Dans ce tourbillon digital, il est donc essentiel de garder la tête froide, retrouver son étoile polaire et éviter d’écrire à côté de sa pensée ! Avoir le courage d’admettre que se distinguer de ses concurrents ce n’est pas être extravagant ni toujours chercher à être dans la disruption.

Les non spécialistes de la communication, dont je suis, se diront que cela semble relever du bon sens et que le digital ne fait peut-être que rendre plus visibles des travers de la communication d’entreprise qui étaient déjà présents, avant l’avènement du digital.

Et la dircom dans tout ça ?

La communication digitale crée de nombreux changements pour les métiers de la communication au sein de l’entreprise. Chacun (marketing, digital, relations clients, affaires publiques) est désormais susceptible de communiquer, la communication n’est plus l’apanage de la direction de la communication qui voit son rôle évoluer vers une nouvelle transversalité entre les différentes directions de l’entreprise.

Les mots empowerment ou capacitation, expérience, do-gooding, désilotage, data-acceleration, green branding, licorne, marketing prédictif ou mobile mindshift vous sont encore étrangers ? L’été approche alors n’oubliez pas vos devoirs de vacances sur le langage digital !

Illustration pour langage digital
Pensées pour le langage digital