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La réunion comme outil du chef de projet

La réunion en questions

Ce billet s’inscrit dans la suite de l’article intitulé La boîte à outils du chef de projet.

La réunion, les instances de travail et de pilotage sont des outils essentiels dans le déroulement d’un projet et la mise en oeuvre du changement. Pourtant….Eh oui ! La réunionite fait bien des dégâts. Contrairement à la grippe ou la gastro elle n’est pas saisonnière et frappe toute l’année.

Je prévois de consacrer plusieurs articles à la réunion, sa préparation, son animation, les suites à lui donner et le rôle des participants mais aujourd’hui je me contenterai de partager avec vous quelques observations à partir des réponses fournies par un échantillon très certainement non représentatif…mais dont les réponses à mon questionnaire (7 questions, dont 5 ouvertes) m’ont paru très représentatives !!
Je vous en propose ici une synthèse.

 

Ice watch, Place du Panthéon, 03/12/15

Qu’évoque le terme « réunion » ?

Sans surprise, la perte de temps, la durée trop longue, les retards reviennent souvent dans les réponses. Réunion est associée à décision. Une décision souhaitée mais qui n’arrive pas.
Autre type de réponse : l’accent est mis sur l’opportunité d’échange, de partage, de débat.
Enfin, certaines réponses font état du travail demandé par les réunions : la préparation, l’organisation sont citées.

La gestion du temps, objet des principales critiques, relève de la responsabilité de l’animateur. Et la gestion du temps, oui, ça s’apprend ! La cause n’est donc pas désespérée, loin de là ! 😉

Et l’animateur ? Et l’animatrice ?

En cohérence avec les réponses apportées à la première question, l’animateur ou animatrice est jugé(e) :
– « insuffisant(e), dans sa manière d’animer » dans les deux tiers des cas.
– « bon/bonne, dans sa manière d’animer » dans un tiers des cas.
La réponse « excellent(e) » n’a jamais été choisie.

Ce qui est jugé insuffisant dans la manière d’animer porte principalement sur :
– les objectifs de la réunion : difficulté à amener la prise de décision, non atteinte des objectifs, voire même absence d’objectifs.
– la non maîtrise du temps.
– le manque de préparation de la réunion.
– le manque de cadrage de la réunion.

Sont également cités :
– le manque d’énergie de l’animateur, qui « sape » celle des participants.
– le manque d’écoute, d’attention portée aux participants.

Mon avis : décidément, rien n’est perdu ! Définir des objectifs, aider les participants à les atteindre, maîtriser le temps, préparer la réunion, la cadrer, tout ça, ça s’apprend et ça se travaille ! Ecouter l’autre, ça aussi ça s’apprend !

Portrait de l’animateur idéal ou de l’animatrice idéale

« On ne se sent pas en réunion »
« Enthousiaste »
« Respect de l’objectif, respect du timing »
« Commencer à l’heure et finir à l’heure »
« Que tout le monde se sente impliqué »
« Donner du temps de parole à tous »
« Provoquer et organiser les échanges de points de vue »
« Amener des corrélations entre points de vue »

Les attentes vis-à-vis de l’animateur sont à la fois très fortes et de natures différentes :
– cadrage de la réunion qui requiert organisation, rigueur et autorité.
– attention portée à chacun qui exige écoute, bienveillance, capacité à créer du lien ou le faciliter.
– une forme de dépassement qui requiert une forme d’exemplarité et d’énergie personnelle.

Un des répondants l’a très justement fait remarquer : l’animateur est, qu’il le veuille ou non, le centre d’attention le temps de la réunion.

Ice watch, Paris, 03/12/15

Votre plus grande difficulté en tant qu’animateur ?

A chacun sa réponse…Cependant, on peut tenter de grouper les réponses par thème de vigilance :
– la maîtrise du groupe : s’assurer que tous les participants restent concentrés, gérer les conflits.
– la satisfaction de chacun : que chacun sorte « content » de la réunion, que les attentes de chacun aient été traitées.
– la valeur ajoutée de la réunion : atteindre les objectifs.
– la préparation de la réunion.

Certaines des réponses montrent donc un niveau d’exigence très élevé de l’animateur vis-à-vis de lui-même.

Les éléments présentés ici ne sont pas propres au chef de projet ou aux réunions animées par le chef de projet. Dans les prochains articles sur le sujet je me centrerai sur les spécificités des instances de pilotage et de travail à organiser par le chef de projet.

Merci encore à chacune des personnes ayant accepté de répondre au questionnaire.

A bientôt pour de nouvelles approches de la réunion comme outil essentiel du chef de projet.

Ours polaire, Place du Panthéon, COP21Illustrations : Ice watch, Place du Panthéon, dans le cadre de la COP21.

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Décision et changement

Pourquoi s’interroger sur le thème décision et changement

J’avais prévu d’écrire quelques lignes sur le thème décision et changement pour rappeler que décider n’est pas changer. Pour autant, la mise en oeuvre réussie d’un changement nécessite nombre de décisions, tout au long du projet qui structure la conception et la conduite du changement. Il faudrait aussi s’interroger sur ces changements qui semblent ne pas nécessiter de prise de décision.

Décider n’est pas changer

Nous le savons tous, il ne suffit pas de le décider pour que le changement advienne. « J’ai décidé de perdre 5 kg ». « J’ai décidé d’arrêter de fumer. » « J’ai décidé d’arrêter de me plaindre ». Ah ! Si seulement il suffisait de le décider….

Pourtant, dans le monde du travail, il arrive que certains l’oublient et croient qu’il suffit de décréter le changement pour qu’il advienne. La réalité leur montrera leur erreur mais comme les dégâts auront déjà été causés il vaut mieux, si vous êtes en position de le faire, proposer à ces personnes de lancer un projet et désigner un/e responsable de projet dont l’objectif sera la bonne mise en oeuvre de ce changement si rapidement décrété.

Décider tout au long du projet

Le/la responsable de projet, en charge de mettre en place le changement, est notamment responsable de définir et structurer l’ensemble des décisions qui sont nécessaires au bon aboutissement du projet. C’est à lui que revient des tâches clés pour la réussite du projet de changement :

  • identifier toutes les décisions à prendre
  • organiser les prises de décision
  • communiquer les décisions prises
  • mettre en oeuvre les décisions prises
  • assurer un suivi de la mise en oeuvre des décisions prises
  • rappeler le sens des décisions prises : garder la mémoire, le fil rouge des décisions prises tout au long du projet.

Les instances de décision

Le responsable de projet doit veiller à ce que les instances de décision soient connues de tous les acteurs concernés et que leurs règles de fonctionnement soient explicites…et pertinentes pour le projet. Il revient notamment au responsable de projet de créer le comité de pilotage du projet.

L’objet de cet article n’est pas de décrire la minutieuse préparation du comité de pilotage qui relève des tâches du responsable de projet mais de proposer quelques outils très simples pour faciliter la bonne prise des décisions attendues du comité de pilotage.

Les responsables de projet aguerris savent bien la propension de certains comités de pilotage à s’improviser groupes de brain-storming au moment de prendre une décision difficile….Si le responsable de projet est l’animateur du comité de pilotage il devra veiller à rappeler leur rôle aux éminents membres du comité de pilotage…;-). Même si cela est chronophage, le responsable de projet aura tout intérêt à préparer le comité de pilotage avec les participants clés, en bilatéral, de façon à désamorcer et éviter toute mauvaise surprise en séance.

Plutôt que  de rédiger un long compte-rendu de réunion qui ne sera lu par personne, j’invite les responsables de projet ou secrétaires de comité à :

  • rédiger un relevé de décision et non pas un compte rendu.
  • rédiger ce relevé de décision pendant la réunion. Utiliser le dernier quart d’heure de la réunion pour noter devant tout le monde (vidéoprojecteur)  les décisions qui viennent d’être prises.
  • faire valider ce relevé de décision en séance.

Recette du relevé de décision en séance

Préparer votre relevé de décisions avant la réunion : vous connaissez les décisions que vous soumettez aux membres du comité et dans certains cas, vous pouvez même préparer la structure de la réponse (oui/non, option basse/option haute, etc.).

Rédiger la version finale du relevé devant tout le monde (vidéoprojecteur), ce qui permettra aux participants d’y ajouter leurs remarques « en direct ».

Enfin, procéder à la validation du relevé de décision « en direct ».

J’ai expérimenté cette pratique dans des instances inter-professionnelles qui utilisaient auparavant la méthode du compte rendu reprenant quasiment in extenso les propos des participants et faisant l’objet de multiples allers retours avant d’être enfin validé, plusieurs jours, voire plusieurs semaines après la tenue de la réunion. Lors des deux ou trois premières réunions avec la méthode de relevé de décision en séance, certains ont été surpris mais quelque temps plus tard, personne n’aurait voulu revenir à l’ancien système et j’ai appris que cette pratique avait été adoptée dans d’autres instances.

Vous l’avez bien compris, cette façon de faire est pertinente pour une instance de décision…pas pour un groupe de créativité !

Les prises de décision

Le responsable de projet doit s’assurer du mode de prise de décision : une décision est-elle prise à l’unanimité du comité de pilotage ? Ou celui qui parle le plus fort l’emporte t-il ?…

Il est de la responsabilité du chef de projet de s’assurer que ceux qui ont la tâche de décider disposent des informations pertinentes pour le faire. Evidence me direz-vous ? Evidence pas si évidente que ça dans la pratique…Le responsable de projet doit vraiment être vigilant à la qualité et pertinence des informations qui vont conduire à la prise de décision. Il revient aussi au responsable de projet de présenter au mieux l’objet de la décision, ses enjeux et conséquences.

En résumé, le responsable de projet doit éclairer celui qui s’apprête à décider, afin de faciliter son choix :

  • qualité et pertinence des informations
  • clarté de la présentation des termes de la décision à prendre.

Le directeur de projet doit aussi s’assurer que le décideur a bien compris la décision qui lui est demandé. Le responsable de projet qui travaille à 200% sur son cher projet oublie que les membres du comité de pilotage ne voient souvent son cher projet que comme un objet un peu exotique, leur participation se résumant à 2 heures de comité de pilotage mensuel…sans avoir lu les documents préparatoires mais en regardant avec amour leur smartphone préféré pendant que le responsable de projet est très fier de leur présenter l’avancement de son cher projet. Toute ressemblance avec des faits…ne serait pas fortuite.

Le responsable de projet devra enfin se méfier des trop fameuses « décisions de coin de table » qui semblent la panacée sur le moment mais sont rétrospectivement de regrettables fausses bonnes idées.

Les directeurs de projet aguerris savent tout cela mais je m’adresse là aux jeunes chefs de projet ! 🙂

La façon de prendre les décisions en fonction de la situation

Il nous paraît évident que l’on ne décide pas de la même façon en situation d’urgence vitale ou pour une prévision à 5 ans impliquant de nombreux acteurs aux profils différents.

Il y a plusieurs façons de décider et suivant le contexte, certaines façons de faire sont plus pertinentes que d’autres. Pourtant, bien souvent, nous décidons sans nous interroger sur la façon dont nous le faisons, trop pressés que nous sommes…d’obtenir une décision !

Rappelons brièvement les différentes façons de décider :

  1. JE décide selon MES idées
  2. JE décide selon NOS idées
  3. NOUS décidons selon NOS idées
  4. VOUS décidez selon VOS idées

Catherine Conti (E.V.A. CONSULTANTS), coach et formateur, m’a fait découvrir le test LJI : indicateur de jugement en situation de leadership (Hogrefe Oxford). Ce test m’a paru particulièrement intéressant pour identifier si nos façons « naturelles » de décider, nos préférences dans le mode de décision sont les plus pertinentes en fonction de la situation. Dit autrement, en tant que manager, savons-nous adapter nos préférences à la situation ?

 

Illustration article décision et changement

Changer sans décider ?

Pour terminer cet article, une observation sur ces petits changements qui semblent se faire sans décision préalable :

  • l’introduction régulière de nouveaux mots dans le jargon de l’entreprise…sans que l’on en connaisse précisément le sens ou l’origine mais dont l’usage semble essentiel à la crédibilité,
  • l’usage abusif du portable pro pendant les jours non ouvrés…
  • la généralisation de la bise aux femmes, créant ainsi une distinction entre femmes et hommes sur le lieu de travail, alors qu’il y a 30 ans « tout le monde » se serrait la main. Je prône quant à moi le retour du baise-main 😉
  • etc.

Je suppose que pour désigner ces phénomènes on préfère le terme d’évolution à celui de changement…Là encore, gardons une attention, une vigilance face aux risques de dérive…Il ne s’agit pas d’aller contre mais de trouver et ajuster sa place, celle où l’on se sent bien.

Certains remarqueront que je n’ai pas traité dans cet article du changement de décision. Ce sera pour une prochaine fois !

Décision et changement : un seul article ne suffit bien évidemment pas pour faire le tour de cette question essentielle pour le bon pilotage du changement mais j’espère que cette toute première approche vous amènera à visiter avec un regard plein de curiosité votre propre pratique de la prise de décision.