Il était une fois un joli nénufar…ou nénuphar
Dans le cadre de la semaine de la langue française et de la francophonie, je vous propose un billet sur une histoire de changement dans l’orthographe, celle du mot nénufar/nénuphar. Une histoire de changement d’orthographe qui fait penser par certains égards à des phénomènes que l’on peut observer dans le domaine du changement en entreprise.
Chacun a récemment entendu les principaux changements apportés par les rectifications orthographiques édictées par le Conseil Supérieur de la Langue Française. Ainsi, nénuphar devient nénufar.
La plupart d’entre nous retiendra donc que nénuphar s’écrit désormais nénufar. Certains d’entre nous découvriront que nénuphar s’orthographiait nénufar jusqu’en 1935. Il s’agirait de rectifier une erreur datant de 1935…
L’histoire détaillée et mouvementée de l’orthographe du mot nénufar/nénuphar, de 1694 à 2016 est narrée dans un très intéressant billet de blog : Nénufar et non plus Nénuphar. Ce billet nous apprend que l’on trouve des traces de la graphie nénuphar depuis…1606 ! Les choses sont donc plus complexes que l’histoire que l’on nous conte aujourd’hui.
Il y aurait donc plusieurs versions à cette histoire de changement :
1/ La version pour Monsieur et Madame tout le monde : nouveauté ! A compter de mars 2016, nénuphar s’écrit désormais nénufar.
2/ La version pour ceux qui tendent l’oreille : ce changement de nénuphar à nénufar n’en est pas un ! Il s’agit d’un simple retour à la version précédente, celle de 1935.
3/ La version pour ceux qui questionnent et creusent : les choses ne sont pas si simples ni linéaires…mais bien intéressantes !
Faire et défaire…une histoire de changement
Cette difficulté à retracer l’histoire des changements de graphie de nénufar/nénuphar, y compris la coexistence des deux graphies m’a fait penser à un ancien collègue qui gardait toutes les versions des notes et rapports que lui demandait de rédiger sa hiérarchie. Au remaniement de la nième version, il avait l’art de ressortir la première version – sans préciser qu’il s’agissait de la première version bien sûr – et obtenait alors la validation de sa hiérarchie sur cette « nouvelle » et « dernière » version. Faire et défaire…
Le changement décidé contribue-t-il efficacement au changement poursuivi ?
Rappelons-le, dans le cas du nénufar le changement poursuivi est la simplification de l’apprentissage de la langue française. Ecrire nénufar au lieu de nénuphar (combien de fois utilise t-on le mot nénufar dans une année ?) contribue t-il efficacement à la simplification de l’apprentissage de la langue française ?….
Cela vous rappellerait-il des exemples en entreprise ? Des écarts étonnants entre changement décidé et changement ou objectif poursuivi…
Des durées des changements et des hommes
Comme moi vous avez dû être surpris du temps nécessaire à la mise en oeuvre de cette décision de simplification de l’orthographe. Les rectifications du Conseil Supérieur de la Langue Française ont été publiées au Journal Officiel du 6 décembre 1990 mais c’est seulement maintenant qu’elles entrent en phase de mise en oeuvre. Entretemps (anciennement entre-temps), les acteurs ont changé, les personnes en poste aujourd’hui ne se sentent pas nécessairement porteuses de ce changement et n’hésitent pas à se désolidariser du changement initié il y a un quart de siècle.
En décembre 1990, Maurice Druon terminait son rapport sur les rectifications orthographiques en écrivant :
Monsieur le Premier ministre, la langueétant chose vivante, il faudra recommencer le travail,dans trente ans, sinon même avant.
Alors, nénufar ou nénuphar ? 😉
Une réponse sur « Petite histoire de changement d’orthographe »
J’aime beaucoup ! Et merci pour le renvoi au billet de blog relatif au nénuphar (il me faut un peu de temps pour adhérer au changement …)
Sylvie